Extension de procédure et avertissement du créancier titulaire d'une sûreté

Affaires - Commercial
10/07/2017
Chacun des codébiteurs solidaires s'engageant distinctement à l'égard du même créancier, le jugement qui étend à l'un la procédure collective ouverte à l'égard de l'autre fait courir au profit de ce créancier, à compter de sa date de publication, un nouveau délai pour déclarer sa créance quand bien même il l'a déjà déclarée au passif de la procédure initialement ouverte. Il en résulte que ce créancier, lorsqu'il est titulaire d'une sûreté régulièrement publiée, doit être averti personnellement d'avoir à déclarer sa créance au passif de celui à qui la procédure a été étendue.
 
Tel est l'enseignement d'un arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 28 juin 2017. En l'espèce, la procédure de redressement judiciaire ouverte le 10 septembre 2012 à l'égard d'un débiteur a été étendue le 21 juin 2013 à son épouse. Une banque qui, le 7 décembre 2012, avait déclaré au passif de la procédure du mari une créance au titre d'un prêt consenti aux époux et garanti par une sûreté réelle, en limitant sa demande aux seuls intérêts à échoir, a déclaré, le 24 octobre 2013, au passif de la femme une créance à titre privilégié incluant le capital restant dû au titre de ce prêt. Le mandataire judiciaire lui ayant opposé la tardiveté de sa déclaration, la banque a saisi le juge-commissaire aux fins de voir juger que le délai de deux mois n'avait pas couru contre elle, faute d'avoir été destinataire de l'avertissement prévu à l'article L. 622-24 du Code de commerce.

La cour d'appel déclare la banque forclose. En effet, elle constate que le mandataire judiciaire a adressé, le 5 juillet 2013, un avertissement à la banque d'avoir à déclarer sa créance dans la procédure collective du mari. Puis, elle retient que cet avertissement a fait courir le délai de deux mois, peu important que cet avis ne mentionnât pas la femme, ni le jugement d'extension à l'égard de cette dernière, dès lors que la créance de la banque résultait d'un prêt consenti aux deux époux et que, par l'effet de l'extension de la procédure collective, ces deux personnes se sont trouvées réunies en une procédure collective unique avec patrimoine commun et unicité d'actifs et de passif, pour en déduire que cet avertissement a suffi à informer la banque de ses droits et obligations.

Mais, énonçant la solution précitée, la Cour de cassation censure l'arrêt d'appel au visa des articles L. 622-24 du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 12 mars 2014, et 1200, ancien, du Code civil (C. civ., art. 1313, nouv.).
 
Par Vincent Téchené
 
Source : Actualités du droit